Source: African Development Bank Group (AfDB) |

Discours prononcé par M. Akinwumi A. Adesina, président du Groupe de la Banque africaine de développement et président de ses Conseils d’administration

Réunion de la Plateforme de dialogue structuré de haut niveau sur l’apurement des arriérés et la résolution de la dette du Zimbabwe

Les progrès que nous avons accomplis, les engagements dont nous avons fait preuve, la résilience de nos efforts collectifs porteront leurs fruits si nous ne faiblissons pas

Harare, Zimbabwe, 26 novembre 2024/APO Group/ --

Excellence, M. Emerson Mnangagwa, président de la République du Zimbabwe,

Excellences, Mesdames et Messieurs les vice-présidents de la République du Zimbabwe,

Excellences, Mesdames et Messieurs les ambassadeurs et chefs de missions diplomatiques,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Mesdames et Messieurs les partenaires au développement,

Mesdames et Messieurs,

Bonjour !

Je suis très heureux d’être de nouveau ici à Harare, dans ce magnifique pays qu’est le Zimbabwe, pour participer à la réunion de la Plateforme de dialogue structuré de haut niveau.

Je tiens à vous remercier, Monsieur le Président Mnangagwa, d’être présent à cette réunion. Vous avez toujours assisté aux dialogues structurés de haut niveau depuis leur lancement en 2022. C’est votre sixième participation. On dit toujours que 7 est le chiffre parfait. J’espère et je souhaite que notre 7e réunion portera sur la conclusion de l’apurement des arriérés et de la résolution de la dette.

Nous sommes également accompagnés aujourd’hui par S.E. le président Joachim Chisano, le facilitateur, qui n’a jamais manqué aucune de nos réunions et dont le leadership et l’engagement ont été une source d’inspiration tout au long de notre parcours. Je sais que vous le cherchez.

Je peux vous dire qu’il est ici en esprit !

Excellences,

Je voudrais ici saluer la mémoire de M. Fidelis Ngorora, directeur de la Direction économique du ministère des Finances, du Développement économique et de la Promotion des investissements, qui nous a malheureusement quitté la semaine dernière. Il a travaillé d’arrache-pied sur les dialogues et dirigeait le groupe de travail sectoriel sur le pilier économique. Malheureusement, il n’est pas parmi nous aujourd’hui. Mais nous poursuivrons la lutte collective. La meilleure manière d’honorer la mémoire de ce fonctionnaire très dévoué et très professionnel est de réussir à apurer les arriérés et à résoudre le problème de la dette du Zimbabwe.

Que son âme repose en paix !

Excellences,

Je suis conscient que depuis notre dernière réunion il y a eu quelques changements, certains ambassadeurs et collègues avec lesquels nous avions commencé sont partis, tandis que de nouveaux sont arrivés. Je souhaite la bienvenue aux nouveaux ambassadeurs : l’ambassadeur Pete Vowles du Royaume-Uni, l’ambassadeur Paul Bertrand Barets de France, l’ambassadeur Adler Aristilde du Canada et l’ambassadrice Pamela Tremont des États-Unis d’Amérique.

Vous êtes venus rejoindre un train en marche vers l’apurement des arriérés et la résolution de la dette du Zimbabwe.

Vous vous joignez à tous vos collègues ambassadeurs et chefs de mission qui vous ont précédés, ainsi qu’à tous les partenaires au développement très dévoués, qui travaillent sans relâche avec le gouvernement du Zimbabwe pour mettre fin aux 23 années de sanctions qui ont laissé le Zimbabwe avec une pile de dettes qui s’élève à 21 milliards de dollars, soit 13 milliards de dollars pour la dette extérieure et 8 milliards de dollars pour la dette intérieure.

Même les guerres ne durent jamais aussi longtemps.

Il est clairement temps de mettre un terme à cette situation, de mettre un terme à des décennies de dommages incalculables causés à l’économie du Zimbabwe, aux souffrances de son peuple, et de prendre un nouveau départ avec un espoir collectif, des aspirations et une prospérité partagée, pour son peuple, aujourd’hui et pour l’avenir.

Le dialogue est l’antidote aux souffrances causées par les différences et les désaccords. Le dialogue nous permet de nous écouter et de nous comprendre, de nous respecter mutuellement, de gérer les différences et de trouver un terrain d’entente pour un engagement constructif, tout en pansant les vieilles blessures et en rétablissant un esprit de réconciliation, de cohésion nationale, en semant un espoir durable, pour une paix et une sécurité économique durables.

Nous pouvons tirer un trait sur le passé et ouvrir de nouvelles perspectives d’espoir pour un avenir meilleur. Car un avenir meilleur attend la jeunesse et les femmes du Zimbabwe. Un avenir meilleur pour cette belle nation au peuple merveilleux, à la beauté naturelle pittoresque, des vieilles ruines du Grand Zimbabwe aux zones verdoyantes de Leopard Rock et des chutes Victoria, « mosi-oa-tunya », la fumée qui gronde.

Il est temps de rendre sa beauté au Zimbabwe.

Personne, aussi fort soit-il, ne peut gravir une colline en portant sur son dos des tas de sable. La dette de 21 milliards de dollars du Zimbabwe, dont la majeure partie est constituée d’arriérés, a fait une nouvelle dette qui s’accumule comme des sacs de sable sur le dos du Zimbabwe.

Nous sommes tous d’accord sur le fait que nous devons jouer notre rôle pour corriger cette anomalie et donner un nouveau souffle à ce pays et à son peuple, afin que le Zimbabwe soit à nouveau dans la course.

Dans la course pour construire des écoles de premier ordre. Dans la course pour construire des infrastructures, des couloirs de transport, des chemins de fer et des lignes de transport d’électricité qui intégreront la région de la SADC et stimuleront la croissance économique et l’emploi.

Dans la course pour booster ses secteurs du tourisme et de l’agriculture et redevenir le grenier de la région.

Dans la course pour débloquer les richesses en minéraux et en métaux que recèlent ses vastes zones minières.

Le Zimbabwe est trop important pour que le monde l’ignore.

Avec ses vastes gisements de minéraux critiques, dont le lithium et le groupe des métaux platineux, le Zimbabwe est l’un des principaux pays garants de l’avenir des transitions énergétiques mondiales.

Dans un monde de concurrence géopolitique et d’efforts pour sécuriser les minéraux et les métaux stratégiques vitaux, nous devons porter un nouveau regard sur le Zimbabwe.

Non pas avec les yeux du passé, mais avec ceux d’un nouvel avenir.

Ce nouveau regard doit nous informer et nous guider vers une approche stratégique et non rétributive.

Excellences,

Avant le Dialogue structuré de haut niveau, il n’existait pas de plateforme formelle de dialogue entre le gouvernement du Zimbabwe, les partenaires au développement et les parties concernées. La plateforme de Dialogue structuré de haut niveau et ses groupes de travail sectoriels progressent avec succès.

Nous avons fait plus de progrès en deux ans que durant les 21 années qui ont suivi l’imposition des sanctions. Le dialogue structuré de haut niveau est la seule voie possible, il n’y en a pas d’autres. Nous devons donc faire en sorte qu’il aboutisse au résultat escompté : l’apurement des arriérés et la résolution de la dette du Zimbabwe.

C’est pourquoi la Banque africaine de développement a fait don de 4,2 millions de dollars aux fins de la facilitation du dialogue structuré de haut niveau. Et nous comptons apporter un soutien supplémentaire, car nous sommes convaincus que ces dialogues portent leurs fruits.

Excellences,

Des progrès significatifs et impressionnants ont été réalisés grâce à l’engagement ferme du gouvernement du Zimbabwe, des partenaires au développement et des parties concernées. Toutefois, les progrès ne sont pas synonymes de perfection. Il y a toujours matière à amélioration.

Le pilier de la croissance économique et de la stabilité a permis des réformes impressionnantes. Elles comprennent la fin des taux de change multiples, l’élimination du système « hollandais » de vente aux enchères de devises et la mise en place d’un système de taux de change basé sur le principe du gré à gré entre acheteurs et vendeurs. La recommandation du FMI d’éliminer le fonctionnement quasi budgétaire de la Banque de réserve a été mise en œuvre et tous les passifs de la Banque de réserve ont été transférés au Trésor.

En décembre 2023, la Banque de réserve avait transféré 3,66 milliards de dollars de dette extérieure au Trésor. Le problème, bien sûr, est que ce nouveau passif a exercé une pression encore plus forte sur la marge de manœuvre budgétaire du gouvernement en augmentant les remboursements de la dette à partir du budget national face à une monnaie affaiblie.

Je suis ravi que le FMI ait mené quatre missions au titre de l’article 4 et des missions techniques au Zimbabwe. La prochaine mission devrait avoir lieu en janvier pour préparer le cadre du programme de référence. Il s’agira d’une étape importante vers la concrétisation de l’apurement des arriérés et de la résolution de la dette.

Je voudrais insister ici sur le fait que nos efforts collectifs seront essentiels pour faire en sorte qu’il s’agisse d’un programme de référence flexible qui offrira une marge de manœuvre budgétaire au pays pour mettre en œuvre les réformes nécessaires et protéger les populations vulnérables.

Excellences,

En ce qui concerne le pilier de la gouvernance, des étapes importantes ont été franchies, contre toute attente. Il a été convenu que l’évaluation des progrès en matière de gouvernance devrait être menée par trois organisations indépendantes et respectées au niveau mondial : (1) le World Justice Project, (2) l’Indice Mo Ibrahim sur la gouvernance africaine, et (3) Transparency International Corruption Perception.

Ces évaluations ont été réalisées.

Le World Justice Report et l’Indice Mo Ibrahim sur la gouvernance africaine ont été publiés le 23 octobre 2024. Les notes globales des deux évaluations ne se sont pas détériorées par rapport à l’année de référence 2019. L’indice Ibrahim a montré une légère amélioration. Sur les 16 indicateurs mesurés par le World Justice Report, 7 sur 16 ont montré des améliorations, tandis que 9 sur 16 ont diminué. Il y a encore des progrès à faire.

Le gouvernement et le Parlement ont également réalisé de bons progrès dans les réformes législatives, qui soutiennent le programme de gouvernance et amélioreront directement les 16 indicateurs de gouvernance, notamment la rédaction du projet de loi contre la peine de mort, du projet de loi sur la protection des témoins et des lanceurs d’alerte et du projet de loi sur la lutte contre la corruption au Zimbabwe.

Il convient également de noter que des progrès ont été réalisés sur le projet de loi sur les organisations bénévoles privées, avec des contributions demandées aux organisations de la société civile.

Je voudrais remercier le président Mnangagwa d’avoir accédé à la demande formulée par le président Chissano et moi-même à ce sujet, à la suite de nos discussions avec les partenaires au développement et les membres de la société civile.

Monsieur le Président, alors que vous examinez le projet de loi soumis à votre signature, nous aimerions vous demander de bien vouloir envisager de prolonger la période d’enregistrement des organisations de la société civile (OSC) de 3 mois à 6 à 9 mois ; et de permettre également aux OSC déjà enregistrées qui ont déposé leurs demandes de continuer à fonctionner jusqu’à ce qu’elles reçoivent le résultat de leur demande.

Excellences,

Je suis ravi du niveau d’engagement affiché et des progrès réalisés dans le cadre du pilier de la réforme agraire et de l’indemnisation des agriculteurs. Il est important de noter qu’un contrat emphytéotique a été rédigé et soumis à l’examen des parties prenantes. Autre preuve d’engagement, le président Mnangagwa a constitué un comité de surveillance au niveau du Cabinet pour coordonner la mise en œuvre afin de garantir que le nouveau contrat emphytéotique soit bancable et transférable. Il s’agit là d’une avancée majeure, qui régularisera la propriété foncière, y compris pour les Zimbabwéens autochtones.

Excellences,

Des étapes importantes ont également été franchies en ce qui concerne l’indemnisation des agriculteurs dans le cadre de l’Acte d’indemnisation globale (Global Compensation Deed, GCD) et de l’Accord bilatéral de protection des investissements et partenariats (BIPPA). Le gouvernement a identifié 437 agriculteurs bénéficiaires du GCD pour un règlement financier d’un montant total de 331 millions de dollars. Le gouvernement a mis de côté 35 millions de dollars dans le budget 2024 pour démarrer les paiements. Le solde sera payé par le biais d’émissions d’obligations.

Il convient également de noter que 99 bénéficiaires du BIPPA ont été autorisés à recevoir des paiements, en commençant par 131,2 millions de dollars, avec une réserve de 20 millions de dollars cette année pour lancer le processus. Les paiements du BIPPA couvriront les investisseurs d’Allemagne, des Pays-Bas, du Danemark, de l’ex-Yougoslavie et de la Malaisie.

Excellences,

Il ne fait aucun doute que beaucoup de choses ont été accomplies. La lumière est au bout du tunnel. Cependant, lorsque nous parviendrons enfin à régler les arriérés et la dette du Zimbabwe, cela libérera l’espace budgétaire nécessaire pour effectuer tous les paiements dus au titre du GCD et du BIPPA.

L’apurement des arriérés est donc une proposition gagnant-gagnant.

Je tiens à assurer le gouvernement et tous les partenaires au développement de ma confiance et de mon soutien indéfectibles à ce processus visant à apurer les arriérés et à résoudre la dette du Zimbabwe. J’ai lancé un appel lors de la revue à mi-parcours du FAD-16 pour que des ressources soient réservées à l’appui de l’apurement des arriérés du Zimbabwe. Nous ferons de même lors de la reconstitution des ressources du FAD-17. Il est donc très important que les ambassadeurs et les partenaires au développement contribuent à faire connaître à leur capitale les progrès très positifs réalisés dans le cadre du processus de dialogue.

À la Banque africaine de développement, nous continuerons à soutenir fermement le Zimbabwe, dans les limites de nos capacités, jusqu’à ce que la situation change.

La Banque africaine de développement soutient activement le secteur privé au Zimbabwe. Entre 2023 et 2024, la Banque a accordé un total de 55 millions de dollars de lignes de crédit, dont 25 millions de dollars à la Central Africa Building Society (CABS), une garantie de transaction de 15 millions de dollars à la NMB Bank et une garantie de transaction de 15 millions de dollars à la First Capital Bank. La Banque africaine de développement travaille actuellement sur une risk agency line of credit

 de 100 millions de dollars pour Old Mutual et CABS.

Le soutien de 25 millions de dollars de la Banque au projet de facilité de production alimentaire d’urgence, approuvé en juillet 2022, a des effets positifs sur la sécurité alimentaire. Il a permis de soutenir plus de 31 000 agriculteurs (dont 35 % sont des femmes) et d’accroître la production alimentaire sur plus de 65 000 hectares de terres, l’objectif étant d’atteindre 200 000 hectares.

Alors que le Zimbabwe fait face aux effets dévastateurs des sécheresses causées par le phénomène El Niño, la Banque africaine de développement apporte son soutien, notamment en fournissant une assurance contre les risques de catastrophe, qui sera désormais renforcée grâce à un don de 47,5 millions de dollars pour le Zimbabwe et le Malawi.

Excellences,

En conclusion, je voudrais souligner que nous devons désormais nous mettre d’accord sur un plan concret assorti d’un calendrier précis pour apurer les arriérés et résoudre la dette. C’est pourquoi la Banque africaine de développement, par l’intermédiaire de sa Facilité africaine de soutien juridique, a soutenu l’engagement d’un cabinet de conseil souverain et du cabinet d’avocats Kepler-Karst pour élaborer un plan et un calendrier adaptés pour apurer les arriérés et résoudre la dette.

Il sera également extrêmement important qu’au moins un pays se fasse le champion de l’apurement des arriérés et de la résolution de la dette. J’étudierai cette question avec certains des partenaires au développement.

Les partenaires au développement doivent collectivement clarifier les éléments déclencheurs et les mesures incitatives pour soutenir le gouvernement du Zimbabwe dans la consolidation des réformes mises en œuvre jusqu’à présent et dans la mise en œuvre de nouvelles réformes. Cela encouragera le Zimbabwe à continuer à aller plus vite, car l’objectif final et les mesures incitatives sont plus clairs.

Excellences,

Les progrès que nous avons accomplis, les engagements dont nous avons fait preuve, la résilience de nos efforts collectifs porteront leurs fruits si nous ne faiblissons pas. Accélérons le rythme et, avec plus de clarté et de détermination, atteignons la ligne d’arrivée : l’apurement complet des arriérés et la résolution de la dette du Zimbabwe.

Que cela se produise lors de la 7e réunion de dialogue de haut niveau.

Comme ce serait merveilleux !

Je vous remercie.

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